
L’étendard a claqué une dernière fois au vent d’Artois
[extrait du journal La Voix du Nord du samedi 19 juin 1993]
Le 7e Chasseurs a définitivement tourné la page arrageoise jeudi lors d’une prise d’armes.
Un carrefour porte son nom et symbolise son attachement à la Citadelle, à la ville.
« Ce soir... à Arras, aux Arrageois, nous disons adieu » : jeudi, sur la place des Héros la bien-nommée, le colonel Louis d’Astorg a prononcé la dernière allocution officielle. Le 7e Chasseurs n’est plus. Au 30 juin de l’an 93, il aura officiellement disparu des tablettes de l’active et son étendard, qui claquait encore fièrement au vent d’Artois, sera roulé, rangé et mis en sommeil.
Pour laisser une trace impérissable des Cavaliers en terre d’Arras, désormais, face à la Citadelle qui les abrita durant vingt-neuf années, le carrefour portera le nom du « 7e régiment de Chasseurs ». Les personnalités ont dévoilé la plaque avant une ultime prise d’armes qui a rassemblé les troupes au pied de l’hôtel de ville. Les capitaines y ont rendu les étendards de leurs escadrons.
C’est face aux quartiers militaires qu’a été ouvert le ban des cérémonies. Le sénateur-maire M. Fatous et le colonel d’Astorg ont dévoilé la plaque du carrefour, en présence du préfet M. Marzin, du général De Percin, commandant la 8e D.I. d’Amiens, du colonel Suchet, délégué militaire départemental, du lieutenant-colonel Faucon, commandant des troupes, d’une foule de personnalités civiles et militaires.
Le deuxième temps ne pouvait avoir d’autre cadre que la Grand’place dont les pavés furent tant de fois foulés lors des revues.
Des distinctions...
Le colonel y passa en revue les escadrons, les sociétés patriotiques, alorsqu’au premier rang avaient pris place les anciens chefs de corps du 7e Chasseurs, fidèles à l’esprit des Cavaliers : les généraux Baton, Bonaventure, Lejeune, Le Mesnil Adelée, de Bressy du Guast, les colonels Hudault, Loriferne, Durieux ; Mgr Derouet, Avêque d’Arras, les conseillers régionaux, généraux, les élus municipaux...
L’hommage officiel fut rendu à l’étendard ; les troupes furent saluées ; les soldats immobiles comme un seul homme ajoutaient à la solennité de la manifestation.
Une remise de distinctions a rehaussé la prise d’armes.
Ont été faits officiers de l’ordre national du Mérite : le lieutenant-colonel Picavet et le chef d’escadrons Poignant ; et chevaliers : MM. Mey et Vahé.
Ont été décorés de la médaille militaire : le major Trullmans ; de la médaille d’argent de la défense nationale : le maréchal des logis chef Neugart ; de la commémorative saoudienne le maréchal des logis chef Belangère.
Pour s’être distingué à Sarajevo dans le cadre de la Forpronu, le pilote de véhicule avant blindé, le caporal-chef Grégory Chapelet, s’est vu remettre une lettre de félicitations signée du général Jéhan de Ceccaldi, commandant le contingent français en Yougoslavie.
Les escadrons rendent leurs « lances »
Tels des Cavaliers, les escadrons ont leurs « lances », leurs étendards coiffés d’une crinière. Tour à tour, les banières ont été remises au colonel d’Astorg. Les capitaines Delannoy (escadron de commandemen,t et des services), Baran (1er escadron AMX 10 RC), de la Forest Divonne (2e escadron), de Font Reaulx (3e escadron), Duhesne (4e escadron Milan) et Pruvost (11e escadron instruction) ont déposé la flamme.
Lundi, à Noyon, sera officiellement remis l’étendard du 7e régiment de Chasseurs au général de Percin, commandant la 8e D.I. d’Amiens, en présence du général Monchal, chef de l’Etat-major de l’armée de terre.
Nostalgie...
Le dernier repos étant prononcé, le pas saccadé des hommes en treillis frappant le pavé de leurs rangers brillantes, s’est estompé à jamais. Restait aux personnalités à se retrouver au sein de l’hôtel de ville pour la réception apportant la dernière note. Nostalgique.
Le colonel d’Astorg rappela le souvenir de ces 29 années de présence à Arras (1er juillet 1964) ; de ces 250 officiers, 650 sous-officiers, quelque 20.000 jeunes soldats qui ont servi en se référant à St-Georges... « Le dernier chapître de l’histoire du 7e s’est refermé ».
« Une telle décision a attristé tous les Arrageois » a ajouté le premier magistrat car « ils étaient habitués à voir évoluer leurs « petits chasseurs » comme aimaient le dire les anciens ». Mais, l’intérêt national prime face aux revendications locales, même si elles sont légitimes, a précisé M. Fatous... « Même si ce départ va créer un moins dans l’activité économique locale ».
Mais, Arras « gardera son statut de ville de garnison avec le 625e régiment de circulation routière ». Régiment dont le personnel va augmenter et qui occupera le quartier Turenne, laissant petit à petit libre le quartier Schramm. Quant à ce dernier site, pourquoi ne pas le réserver pour « une délocalisation parisienne, une annexe d’un lycée ou de l’université ; pourquoi ne pas y installer le service départemental d’incendie et de secours ? ».
La question est posée. Elle est née de la dissolution d’un régiment. La page d’un livre de gloire est définitivement tournée...
M. VERRIEST