7e Régiment de Chasseurs

Colonel SOURD (1775-1849) dans la légende du 7e Chasseurs

samedi 30 juillet 2011 par Colonel (er) Lucien Suchet

Parmi les figures de l’Empire, le personnage est peu connu mais les férus de la petite histoire ont entendu parler d’un colonel, exceptionnellement brave, remonté à cheval après l’amputation d’un bras à Genappe près de Waterloo en 1815.

Né à Signes (Var) le 24 juin 1775, Jean-Baptiste Sourd s’engage dans les armées de la République en 1792 à 17 ans. En Italie, il se distingue au siège de Gênes en dégageant le général Masséna, pressé par les autrichiens. Il est aussitôt nommé maréchal des logis dans le corps des Guides. Il est blessé au passage du Mincio, le 26 décembre 1800. Quand vient la paix de 1801, Sourd compte déjà onze campagnes et deux blessures. Il est nommé sous-lieutenant au 7e régiment de Chasseurs à cheval en 1803. Il est de nouveau blessé à Iéna où il est promu lieutenant. On le retrouve en 1807 en Pologne. Blessé de plusieurs coups de sabre à Eylau, il est fait prisonnier des Russes, qui le rendront à son régiment dix mois plus tard. Il est promu capitaine pendant la Campagne d’Allemagne et reçoit la légion d’honneur à la bataille de Wagram. Chef d’escadrons pour la Campagne de Russie, le 18 octobre 1812, il met en déroute près de Polotsk un corps de 2 000 Russes. Lors de la retraite, sous les yeux de l’Empereur, il franchit à la nage la Bérésina à la tête du 7e Chasseurs, chaque cavalier portant en croupe un voltigeur. L’Empereur lui remet son brevet de colonel et le titre de Baron d’Empire à Dresde, avec ces mots : « Servez-moi comme vous avez toujours fait, avec votre courage et vos talents, et vous irez loin ». Il quitte le 7e Chasseurs à cheval en septembre 1813 pour prendre le commandement du 20e régiment de Chasseurs à cheval. A la bataille de Leipzig, il charge à tout va. Sourd reconnaît de nuit le champ de bataille de Hanau. Après les combats du lendemain, Napoléon le fait officier de la légion d’honneur. Dans la campagne et la retraite de 1814, il charge plusieurs fois à la Chaussée, contient l’avant-garde de Blücher à la Ferté sous Jouarre et sera blessé une neuvième fois à Fère Champenoise le 9 février 1814. Il contribue aussi au succès de Grouchy à Champaubert, Montmirail et Vauchamps, dégage plusieurs fois l’infanterie de la Garde à Arcis-sur-Aube, et maintient libres les itinéraires importants nécessaires au repli de l’armée impériale. En coup de main, il fonce avec 400 chevaux dans Bar sur Ornain (Bar-le-Duc), et y met en déroute dans les rues un corps russe considérable. Après le 30 mars, il rejoint l’Empereur à Fontainebleau.

A la Restauration il commande le régiment des Lanciers de la Reine et pendant les Cent Jours le 2e régiment de Lanciers. Le 17 juin 1815, Sourd est grièvement blessé à Genappe en Belgique. Mais laissons parler le chirurgien Larrey dans ses "Mémoires de chirurgie militaires et campagnes" :

Un officier supérieur, le colonel Sourd, vrai et digne guerrier, est un des blessés les plus remarquables de cette journée. Il avait combattu à la tête de son régiment, le 20e Régiment de Chasseurs à cheval ; c’est dans les charges répétées de ce corps que ce brave colonel reçut presque au même instant plusieurs coups de sabre au bras droit... Deux des blessures pénétraient dans les articulations du coude et du poignet, le troisième coup de sabre avait coupé jusqu’à l’os les muscles du bras et l’artère brachiale : on avait prévenu les effets fâcheux de l’hémorragie par l’application d’un bandage compressif fait sur le champ de bataille, où l’on avait déjà jugé indispensable l’amputation du membre. Dans cette conviction, le colonel me fit appeler pour la pratiquer. En effet, avec plusieurs de mes confrères appelés en même temps que moi près de ce colonel, je la reconnus nécessaire et urgente, et nous y procédâmes immédiatement. Pendant cette opération, le colonel Sourd dicta une lettre à l’Empereur pour le prier de lui conserver le commandement de son régiment. Non seulement il ne manifesta aucun signe de douleur mais à peine le pansement de la plaie du moignon fut-il terminé, qu’il remonta à cheval et s’éloigna... Il parvint peu de temps après à la guérison”.

Le certificat médical de cette fameuse affaire, établi par Poussiergues, chirurgien major au 2e Lanciers, figure dans le dossier du colonel Sourd aux archives de Vincennes. Il indique que le colonel a reçu six coups de sabre à Genappe et que "« Malgré l’affaiblissement total du colonel par la perte considérable de sang avant et pendant l’opération, malgré les douleurs occasionnées par les différentes contusions reçues sous les pieds des chevaux au moment de diverses charges de cavalerie, le Baron Sourd a été guéri en l’espace d’un mois, après quoi il reprit la tête de son régiment »".

Le chirurgien major termine son rapport en précisant ¨« après son amputation, Sourd a effectué un trajet à cheval de plus de 150 lieues, soit 600 kilomètres ! » La légende veut que Sourd, bien qu’amputé d’un bras, soit reparti à la charge. Cependant, il est vrai que cet homme, à la résistance exceptionnelle, trouva le courage d’effectuer sur le champ un périple de 600 kilomètres et reprit le commandement de son régiment un mois plus tard. Il s’éteindra 34 ans après l’événement, en 1849… dans son lit… après avoir été nommé Maréchal de Camp en 1831 et fait commandeur de la légion d’honneur en 1837.

Colonel (er) Lucien Suchet.


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